Madagascar verrouille l'information sur la pandémie de coronavirus qui submerge ses hôpitaux, dénonce l'organisation Reporters sans frontières (RSF), craignant que le gouvernement ne se serve de la pandémie pour restreindre durablement la liberté de la presse.
Neuf émissions de télé et de radio ont été suspendues la semaine dernière, sous prétexte qu'elles étaient "susceptible de troubler l'ordre et la sécurité publiques et nuire à l'unité nationale", suscitant "un véritable tollé" dans l'île, note RSF dans un communiqué.
Ces programmes, "des débats politiques ou faisant intervenir des auditeurs ou téléspectateurs en direct" étaient diffusés par 14 médias différents.
Plusieurs de ces médias ont dû écrire "une lettre d'engagement" sur leur contenu afin de reprendre la diffusion de ces programmes, déplore RSF, qui "exhorte les autorités malgaches à ne pas verrouiller l'information" sur l'épidémie dans le pays.
"La crise sanitaire ne peut servir de prétexte pour restreindre la liberté d'informer a priori", dénonce le responsable du bureau Afrique de RSF Arnaud Froger dans ce communiqué publié jeudi.
"Empêcher les journalistes de travailler et le débat critique d'avoir lieu à titre préventif relève de la censure et répond à des objectifs de communication, pas de lutte contre l'épidémie", poursuit-il.
RSF cite la ministre de la Communication, Lalatiana Rakotondrazafy Andriatongarivo, selon laquelle la suspension des émissions ne constitue "nullement une velléité de censure ou d'entrave à la liberté de la presse", mais plutôt une "mesure pour lutter contre la pandémie".
La présidence n'avait pas répondu aux demandes de commentaires de l'AFP vendredi après-midi. Certains médias, dont la chaîne d'opposition MBS, ont contesté en justice la suspension des émissions.
"Le problème est résolu partiellement, mais le fond du conflit n'a pas été soulevé", estimait vendredi son directeur de la publication, Joël Ralaivoahita, interrogé par l'AFP. "On ne devrait pas avoir à écrire une lettre d'engagement pour pouvoir faire notre travail", a-t-il dit.
Madagascar est aux prises avec une recrudescence des contaminations au coronavirus, avec plus de 9.900 cas officiellement recensés depuis le début du mois, pour un total de 37.000 cas et 643 morts jusqu'à présent. Cette poussée a incité le président Andry Rajoelina à abandonner sa position intransigeante contre les vaccins, qui doivent arriver en mai.
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