Des dizaines de manifestantes se revendiquant comme "féministes" ont dénoncé samedi à Dakar, à visage découvert, le laxisme de la justice et la trop grande tolérance de la société sénégalaise envers les violences faites aux femmes.
Elles étaient une trentaine, réunies sur la place de la Nation, traditionnel lieu des manifestations dans la capitale sénégalaise, à l'appel du tout nouveau "Collectif des féministes au Sénégal contre les violences faites aux femmes", créé après une nouvelle retentissante affaire de viol d'une adolescente.
Les manifestantes, assises en cercle, arboraient des pancartes où l'on pouvait lire "Stop à l'impunité", "Brisons la violence, pas les femmes" ou encore "Stop à la culture du viol". Beaucoup d'entre elles portaient un t-shirt barré du slogan "Justice pour toutes les Louise".
"Louise" est le pseudonyme d'une jeune fille d'une quinzaine d'années qui a porté plainte en mai pour viol contre un de ses condisciples du Lycée français de Saly, station balnéaire située au Sud de Dakar.
L'accusé, qui a évoqué une relation consentie, est un jeune homme de 19 ans, fils d'un célèbre journaliste, ce qui a amplifié le retentissement médiatique de l'affaire. Il lui est également reproché d'avoir diffusé une vidéo intime de la jeune fille, mineure.
"Malgré la plainte, rien n'a été fait pendant un mois et il a été autorisé à finir son année scolaire. Louise l'a croisé tous les jours à l'école, sous le regard de ceux qui ont vu la vidéo, on en a marre", a déclaré à l'AFP l'une des manifestantes, Eva Rassour.
Ce n'est qu'après la révélation il y a une dizaine de jours de la plainte par des médias sénégalais, dont certains ont dévoilé l'identité véritable de Louise ou l'ont qualifiée "d'aguicheuse", que l'accusé a été interpellé.
Malgré sa modestie, ce premier rassemblement au Sénégal sous la bannière féministe est un signe encourageant dans une société "très patriarcale" où les affaires de viols restent souvent dans l'intimité des familles, estime Eva Rassour.
La porte-parole du nouveau collectif, Aïssatou Sène, a pour sa part réclamé devant la presse que la loi de 2019 qui a fait du viol un crime, passible de la prison à perpétuité, et non plus un délit, soit appliquée "dans toute sa rigueur", ce qui est loin d’être le cas.
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