"La France rappelle que le cadre juridique de sa coopération avec le Niger en matière de défense repose sur des accords qui ont été conclus avec les autorités nigériennes légitimes", a réagi vendredi le ministère français des Affaires étrangères.
Ces autorités "sont les seules que la France, comme l'ensemble de la communauté internationale, reconnaît", a-t-il ajouté, tout en "prenant note" du communiqué de la junte.
Pour Paris, les accords restent donc en vigueur mais ils sont pour l'heure actuelle pas appliqués car il n'est pas question de coopérer avec les putschistes.
"Il est entendu que notre coopération militaire a été totalement suspendue depuis le putsch", a souligné une source diplomatique.
L'ancien chef de la garde présidentielle au Niger, le général Abdourahamane Tiani, a pris le pouvoir à la tête d'une junte le 26 juillet, retenant prisonnier depuis le président élu Mohamed Bazoum.
Jeudi soir, les militaires au pouvoir ont annoncé, dans un communiqué lu à la télévision, qu'ils dénonçaient "les accords de coopération dans le domaine de la sécurité et de la défense" avec Paris.
La France - qui a évacué un millier de personnes dont 577 de ses ressortissants mardi et mercredi du Niger - compte 1.500 soldats déployés pour la lutte antijihadiste, dans ce pays miné par les violences de ces groupes armés.
- Rétablir la démocratie -
Le Niger constitue le pivot du dispositif antijihadiste français au Sahel depuis le départ contraint du Mali, voulu par la junte au pouvoir dans ce pays, à l'été 2022. Et un retrait des militaires serait un revers cuisant pour Paris.
Alors qu'auparavant le Niger servait essentiellement de base de transit pour les opérations au Mali, le pays accueille en effet le coeur du dispositif militaire français, sur la base aérienne projetée (BAP) de Niamey, où sont déployés en permanence cinq drones Reaper et au moins trois avions de chasse Mirage.
Certains des accords avec Niamey concernent le "stationnement" du détachement français et le "statut" des militaires présents dans le cadre de la lutte antijihadiste, ont rappelé les putschistes.
Un retrait du Niger n'est "pas du tout à l'ordre du jour", avait, de son côté, affirmé mardi l'état-major français.
Depuis, malgré la pression des putschistes sur Paris - ils ont limogé l'ambassadrice du Niger en France jeudi soir - le gouvernement français garde son calme et met en avant sa volonté de rétablir le président légitime.
"Nous restons attachés au rétablissement de la démocratie au #Niger et soutenons le président démocratiquement élu", a une nouvelle fois souligné la cheffe de la diplomatie Catherine Colonna dans un message posté jeudi soir sur le réseau X (ex-Twitter), après un entretien téléphonique avec son homologue Anthony Blinken.
Etats-Unis et Européens restent déterminés à faire pression pour faire libérer le président Bazoum.
- "Impasse" -
Selon une source diplomatique française, son retour reste encore possible alors que les pays de la Cédéao (Communauté économique des Etats d'Afrique de l'ouest) ont réagi fermement en dénonçant ce putsch et en posant un ultimatum, jusqu'à dimanche, pour le rétablissement de l'ordre constitutionnel.
Cette source met aussi en avant les rivalités au sein des putschistes entre le général Tiani et le général Salifou Mody, ancien chef d'état-major.
"On est face à un groupe qui ne savait pas très bien dans quoi il s'est lancé, qui est probablement pris au dépourvu par la rigueur de la réaction internationale et la rigueur du président Bazoum qui a fait savoir qu'il ne démissionnerait pas de ses fonctions", a souligné cette source à des journalistes.
"Etant dans l'impasse, le groupe tente d'impressionner et jouer l'escalade mais il reste confronté à un front très uni de la communauté internationale", a-t-elle ajouté.
L'ambassadrice du Niger en France, Aïchatou Boulama Kané, a affirmé vendredi à l'AFP "être toujours" l'ambassadrice en France "du président légitime Mohamed Bazoum", ajoutant qu'elle jugeait "comme nulle et non avenue" la décision des putschistes de mettre fin à ses fonctions.
La dénonciation des accords militaires avec la France est "illégale" et "regrettable", a-t-elle en outre commenté.
Elle a estimé que la coopération avec la France "en matière de défense et de sécurité est une collaboration très importante qui marche bien et qui nous permet d'avoir des résultats probants sur le terrain en matière de lutte contre le terrorisme".
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