"Tous les éléments d'une éventuelle intervention ont été élaborés lors de cette réunion, y compris les ressources nécessaires, mais aussi la manière et le moment où nous allons déployer la force", a déclaré le commissaire chargé des Affaires politiques et de la Sécurité, Abdel-Fatau Musah.
Les putschistes avaient auparavant promis une "riposte immédiate" à "toute agression" du bloc ou d'un de ses pays.
"La CEDEAO ne va pas dire aux putschistes quand et où nous allons frapper", a ajouté M. Musah, évoquant une "décision opérationnelle qui sera prise par les chefs d'Etat" du bloc.
Plusieurs armées ouest-africaines, dont celle du Sénégal, s'étaient dites auparavant prêtes à envoyer des soldats.
-Voie diplomatique privilégiée -
Le 30 juillet, en imposant de lourdes sanctions à Niamey quatre jours après le coup d'État qui a renversé Mohamed Bazoum, la CEDEAO avait donné sept jours aux putschistes, soit jusqu'à lundi 7 août, pour rétablir dans ses fonctions le président démocratiquement élu, sous peine d'utiliser "la force".
À deux jours de la fin de l'ultimatum, M. Musah a toutefois assuré vendredi que le bloc ouest-africain continuait à privilégier la voie diplomatique pour résoudre la crise, ce qu'a également tenu à affirmer le Bénin, pays voisin du Niger, même si la délégation de la CEDEAO envoyée dans la nuit de jeudi à vendredi à Niamey en est repartie au bout de quelques heures seulement.
Conduite par l'ex-président nigérian Abdulsalami Abubakar, elle n'a pu rencontrer ni le chef de la junte, le général Abdourahamane Tiani, ni le président renversé.
Elle s'est entretenue à l'aéroport avec des militaires putschistes sur "les dernières propositions de sortie de crise de la CEDEAO ", selon le quotidien gouvernemental nigérien Le Sahel.
Le gouvernement allemand a appelé vendredi à poursuivre les "efforts de médiation" et éviter toute intervention armée.
- Rupture de la coopération militaire -
De son côté, la porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Anne-Claire Legendre, a affirmé vendredi soir sur BFM-TV qu'une éventuelle intervention militaire de la France n'était "pas la question aujourd'hui".
Paris soutient "la CEDEAO pour essayer d'obtenir des putschistes qu'ils entendent le message de la communauté internationale".
Tard jeudi, les putschistes avaient eu dénoncé "les accords de coopération dans le domaine de la sécurité et de la défense avec la France".
L'ex-puissance coloniale déploie au Niger un contingent militaire de 1.500 soldats pour la lutte antiterroriste dans ce pays miné par les violences jihadistes.
Paris a déclaré vendredi que seules "les autorités nigériennes légitimes" avaient le pouvoir de revenir sur ces accords.
Vendredi matin, une centaine de manifestants originaires de plusieurs pays ouest-africains se sont réunis à Niamey pour protester contre toute intervention militaire extérieure.
Plus tard, près de 200 étudiants ont manifesté dans le même sens. S'adressant à eux, un responsable étudiant, Bakin Batouré Almoustapha, a dénoncé une " CEDEAO des chefs d'État" qui agit au détriment "de la CEDEAO des peuples", appelant à soutenir sans réserve les putschistes.
- "Répression autoritaire" -
A Tahoua (ouest du pays), des centaines de personnes se sont rassemblées cette fois "pour apporter un soutien indéfectible au président Bazoum et exiger sa libération sans conditions", selon un journaliste sur place.
M. Bazoum s'est exprimé jeudi dans une tribune publiée par le quotidien américain Washington Post. Il a mis en garde contre les conséquences "dévastatrices" du coup d'État pour le monde et le Sahel, qui pourrait passer, selon lui, sous l'"influence" de la Russie par le biais du groupe paramilitaire Wagner.
"J'appelle le gouvernement américain et l'ensemble de la communauté internationale à aider à restaurer l'ordre constitutionnel", écrit-il, "à titre d'otage".
M. Bazoum, 63 ans, est retenu avec sa famille depuis le jour du putsch dans sa résidence présidentielle. Ses "conditions de détention se dégradent", a affirmé Mme Legendre.
Les putschistes ont annoncé la levée du couvre-feu instauré depuis le 26 juillet, et ils ont limogé l'ambassadrice nigérienne à Paris, tout comme les représentants du Niger aux États-Unis, au Togo et au Nigeria.
L'ambassadrice à Paris, Aïchatou Boulama Kané, a affirmé vendredi à l'AFP "être toujours" l'ambassadrice "du président légitime Mohamed Bazoum".
Jeudi, les programmes de Radio France Internationale (RFI) et de la chaîne de télévision d'information France 24 ont été interrompus au Niger.
Ces deux médias sont déjà suspendus au Burkina Faso et au Mali voisins, où les militaires nigériens au pouvoir ont envoyé des délégations mercredi.
Les putschistes ont mis en place "une répression autoritaire", a affirmé Mme Legendre.
Après l'évacuation par la France de 577 de ses ressortissants, l’armée de l’air espagnole a évacué vendredi de Niamey à Madrid 74 personnes de 18 nationalités différentes.
Après la France, l'Allemagne et les Pays-Bas, les États-Unis ont annoncé vendredi soir la suspension des programmes d'aide au gouvernement du Niger.
Mais "la délivrance d'aide humanitaire et alimentaire vitale va se poursuivre", a précisé dans le même communiqué le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken.
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