Le Front de libération au Mozambique (Frelimo) devrait, sauf forte surprise, se maintenir à tous les postes-clé du pouvoir, en dépit des critiques et des dissensions, comme depuis l'indépendance il y a déjà un demi-siècle.
"Le Frelimo sera en tête on le sait, il l'est toujours", confie à l'AFP Dulce Micas, en marge d'un meeting de l'opposition près de la capitale Maputo.
Le président sortant Filipe Nyusi, que la constitution interdit de se représenter après deux mandats, avait été élu il y a cinq ans avec 73% des voix contre 22% pour son principal rival de la Renamo, ex-rébellion devenue le principal parti d'opposition.
"Nous n'avons aucun doute, nous allons gagner!", a-t-il déclaré dimanche, lors du dernier meeting de campagne du Frelimo.
"Rien ne va changer, les résultats seront les mêmes", pronostique aussi Domingos Do Rosario, qui enseigne les sciences politiques à l'Université Mondlane de Maputo, soulignant la faiblesse des traditions démocratiques de son pays aux fortes inégalités, où "le clientélisme" règne en maître.
"L'intégrité du processus électoral est un vrai problème", ajoute Borges Nhamirre, de l'Institut d'Etudes pour la sécurité de Pretoria. "Les institutions à tous les niveaux --corps électoraux, tribunaux, police-- vont manipuler le scrutin".
Le probable futur président, Daniel Chapo, 47 ans, n'a aucune expérience gouvernementale, ni du parti au niveau central. Cet ancien gouverneur provincial, désigné par le Frelimo à la surprise générale, serait le premier président né après l'indépendance.
Et le premier à n'avoir pas combattu lors de la guerre civile (1975-1992) qui a fait un million de morts et a connu des combats ultérieurs jusqu'à l'accord de paix définitif de 2019.
- "Triche" redoutée -
"C'est un inconnu", souligne Borges Nhamirre. "Il a été choisi par le Frelimo car finalement, c'est le plus aisé à influencer": différentes factions chercheront à lui imposer des ministres à des postes-clé, estime le chercheur mozambicain.
Ces dernières semaines de campagne ont fait émerger un opposant charismatique, Venancio Mondlane, 50 ans, qui a récemment quitté la Renamo après avoir échoué à en prendre la tête.
Orateur de talent, il déplace des foules et suscite de l'espoir, notamment auprès de la jeunesse. "Il est intelligent, il a du bon sens, j'aimerais tellement qu'il soit élu", soupire Olga, 30 ans, qui vend du poisson séché sur un marché à l'ouest de la capitale.
"Si les élections étaient libres et équitables, il aurait des bonnes chances d'émerger comme le nouveau leader de l'opposition", estime M. Nhamirre.
Mais la commission électorale (CNE), dirigée par un ancien évêque anglican jugé trop proche du pouvoir, et "complètement discrédité" selon un universitaire qui tient à conserver son anonymat, accordera peut-être à "Venancio", comme l'appelle la rue, "quelque 10% des voix, voire un peu plus, pour éviter des violences".
Cette commission "est une blague, elle fabrique des électeurs", dénonce M. Do Rosario, estimant que le chiffre de 17 millions d'inscrits, sur une population totale, et jeune, de 33 millions, n'a aucun sens. "On ne peut pas croire à ces chiffres là".
Les municipales de 2023, très favorables au Frelimo, avaient déclenché des manifestations dans les grandes villes du pays lusophone d'Afrique australe. Plusieurs personnes avaient été tuées "accidentellement" par les forces de l'ordre.
"Depuis une vingtaine d'années, le Frelimo a privatisé l'Etat" et "la triche" électorale est omniprésente, affirme Domingos Do Rosario, mettant en garde contre des protestations dans les semaines qui suivront le scrutin.
Le Mozambique, très affecté par le déréglement climatique entre cyclones destructeurs et sécheresse, reste l'un des pays les plus pauvres au monde. Un projet de gaz naturel dans le nord est paralysé depuis 2021 par des violences de groupes armés jihadistes.
"Nous allons continuer à lutter pour débarrasser le pays du terrorisme", a promis et insisté Daniel Chapo dimanche.
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