"Evidemment, je suis fortement en faveur d'un texte qui inclut la sortie (des énergies fossiles)", même avec un calendrier progressif, a déclaré Antonio Guterres mercredi avant de s'envoler pour Dubaï où s'annonce une bataille autour de ce sujet pendant les deux semaines de cette grand-messe climatique annuelle.
Face à l'action mondiale très insuffisante pour respecter l'objectif le plus ambitieux de l'accord de Paris de limiter le réchauffement à +1,5 degré Celsius, certains pays veulent que le document final de la COP28, à adopter par consensus, appelle explicitement à réduire les énergies fossiles.
Un défi alors qu'aucune COP n'a jamais jusqu'ici réussi le faire, celle de Glasgow en 2021 mentionnant seulement le charbon.
Mais pour Antonio Guterres, très engagé dans le combat climatique, une simple promesse de réduction des énergies fossiles, principales responsables du réchauffement de la planète, ne serait pas suffisante.
"Je pense que ce serait dommage si nous en restons à une +réduction+, vague et évasive, dont le véritable sens n'est clair pour personne", a-t-il insisté.
"Une réduction, ça peut être n'importe quoi, on ne sait jamais ce que ça veut dire. +Sortie+ veut dire qu'à un certain moment on arrête. Même si on ne peut pas arrêter demain", a-t-il ajouté, appelant à ce que cette sortie totale se fasse "de façon organisée", dans un calendrier "crédible" et en accord avec l'objectif des 1,5°C.
Au moment où le président émirati de la COP28, Sultan Al Jaber, également patron de la compagnie pétrolière nationale Adnoc, est empêtré dans des accusations de conflits d'intérêt, Antonio Guterres l'a appelé à utiliser sa situation particulière pour convaincre de la nécessité de cette sortie des énergies polluantes.
"Je pense qu'il est dans une meilleure position pour dire ça à ses collègues de l'industrie des énergies fossiles que s'il était membre d'une ONG avec un bilan pro-climat solide".
- L'objectif 1,5°C n'est "pas mort" -
"Cela lui donne l'opportunité de donner tort à tous ceux qui l'accusent, et cette opportunité est d'être en première ligne des efforts pour créer les conditions d'un calendrier adéquat pour la sortie des énergies fossiles", a-t-il ajouté, jugeant "inconcevable" que le responsable émirati ait utilisé sa fonction de président de la COP28 pour promouvoir des projets pétroliers et énergétiques de son pays.
Autre question clé de la COP28 : le développement des énergies renouvelables.
"Nous devons tripler les renouvelables au niveau mondial", et pas seulement par des engagements volontaires de certains Etats, a plaidé Antonio Guterres.
Dans ce cadre, il a espéré que la COP28 permettrait de faire "gagner du terrain" à l'idée d'un programme mondial "massif" d'investissements en Afrique, continent qui vit "une absurdité, avec 60% des capacités solaires mais 2% des investissements dans le solaire".
"Un grand nombre d'autres mesures sont essentielles pour faire de cette COP un succès", a-t-il ajouté, mentionnant notamment la "justice climatique".
La COP27 tenue en Egypte l'an dernier avait permis une percée majeure dans ce domaine avec la création d'un fonds destiné à compenser les "pertes et dommages" des pays à la fois particulièrement vulnérables aux impacts climatiques et le moins responsables historiquement des émissions de gaz à effet de serre. Mais sa mise en œuvre est compliquée.
Il faut que cette COP propose une véritable avancée "pour le fonds sur les pertes et dommages, avec des contributions significatives", a plaidé Antonio Guterres.
Alors que les tempêtes, inondations, incendies ou sécheresses se multiplient déjà, le monde est aujourd'hui sur la voie d'un réchauffement allant de 2,5°C à 2,9°C au cours de ce siècle.
Mais face à cette perspective de "catastrophe totale" sur laquelle il ne cesse d'alerter, le chef de l'ONU ne veut pas abandonner l'espoir de limiter le réchauffement à 1,5°C.
L'objectif de 1,5°C "n'est pas mort, il est vivant", a-t-il affirmé.
"Nous avons le potentiel, les technologies, les capacités, et l'argent -- l'argent est là, c'est juste une question de l'orienter dans la bonne direction", a-t-il assuré.
"La seule chose qui manque toujours, c'est la volonté politique. Et c'est pour ça que la COP est importante, pour que les gens comprennent que nous allons toujours dans la mauvaise direction".
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