Menace d'inculpation contre limogeage : l'enquête sur l'assassinat en juillet du président haïtien a de nouveau tourné à la confusion mardi exposant au grand jour les luttes intestines à la tête du pays le plus pauvre des Amériques.
Le chef du parquet de Port-au-Prince, la capitale d'Haïti, a demandé dans la matinée au juge enquêtant sur le meurtre du président Jovenel Moïse d'inculper le Premier ministre, en raison d'appels téléphoniques qu'il aurait eus avec l'un des principaux suspects dans l'affaire.
Bed-Ford Claude, le commissaire du gouvernement de Port-au-Prince équivalent du procureur a aussi exigé que Ariel Henry soit interdit de quitter le territoire haïtien "en raison de la gravité des faits exposés". Il avait assuré disposer de suffisamment d'éléments compromettants.
Mais quelques heures plus tard, coup de théâtre : le Premier ministre annonce limoger le procureur pour "faute administrative grave".
Ce nouveau rebondissement s'ajoute à l'immense chaos qui règne dans l'enquête sur l'assassinat le 7 juillet de Jovenel Moïse par un commando armé.
Quarante-quatre personnes, dont 18 Colombiens et deux Américains d'origine haïtienne, ont déjà été arrêtées dans le cadre de l'enquête sur ce meurtre, commis à son domicile sans qu'aucun policier de sa sécurité rapprochée ne soit blessé.
- "Actes politiques" -
Rapidement, certains spécialistes du droit se sont alarmés de la mainmise de politiques sur la justice, voyant dans la démarche du procureur une entrave à l'indépendance de cette institution. Certains dans les cercles du gouvernement avaient en effet appelé ces derniers jours à la démission du Premier ministre.
"Ce sont des actes grotesques et des actes politiques", a accusé auprès de l'AFP Samuel Madistin, avocat d'une organisation de défense des droits humains.
Le procureur avait lancé la première estocade vendredi en demandant au chef du gouvernement de présenter au parquet afin de s'expliquer dès mardi sur les conversations téléphoniques qu'il aurait eues avec l'une des personnes activement recherchées.
Comme Joseph Félix Badio, ancien cadre de l'unité de lutte contre la corruption, qui aurait été géolocalisé dans le quartier où se situe la résidence privée de Jovenel Moïse lors des appels passés à Ariel Henry à 04h03 puis 04h20 la nuit de l'attentat.
Le lendemain le Premier ministre avait dénoncé la démarche du procureur, la qualifiant de diversion "pour semer la confusion et empêcher la justice de faire sereinement son travail".
"Les vrais coupables, les auteurs intellectuels et les commanditaires de l'assassinat odieux du président Jovenel Moïse seront trouvés, traduits en justice et punis pour leur forfait", avait-il ajouté.
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