L'incendie samedi soir dans ce centre de détention tristement célèbre a été provoqué par des "voyous qui ont mis le feu à un entrepôt de vêtements", et des affrontements ont opposé "émeutiers" et gardiens, a indiqué l'agence officielle Irna.
Le feu a été maîtrisé et "la situation est revenue à la normale", ont affirmé les autorités.
"Quatre prisonniers, des condamnés pour vol, sont morts en raison de l'inhalation de fumée et 61 autres ont été blessés dont quatre grièvement", a indiqué l'Autorité judiciaire.
Irna a souligné que les troubles à Evine n'avaient "rien à voir" avec les manifestations dans le pays déclenché par la mort le 16 septembre de Mahsa Amini, 22 ans, et entrées dans leur cinquième semaine malgré la répression qui a fait au moins 108 morts selon l'ONG Iran Human Rights (IHR).
D'après des images postées sur les réseaux sociaux, des coups de feu et le bruit d'explosions ont été entendus durant l'incendie à la prison, où sont notamment détenus des étrangers et qui est connue pour ses mauvais traitements des détenus politiques.
Des centaines des personnes arrêtées lors des protestations contre la mort de Mahsa Amini auraient été envoyées dans cette prison.
Malgré le bouclage des routes vers Evine, des manifestants s'y sont rendus à pied et des chants de "Mort au dictateur" -l'un des principaux slogans de la contestation- ont été entendus dans des vidéos partagées par le média en ligne 1500tasvir.
Après l'incendie, plusieurs ONG ainsi que les Etats-Unis ont exprimé leurs inquiétudes au sujet des prisonniers, mais plusieurs détenus étrangers ont pu contacter leurs familles.
"La vie de chaque prisonnier politique et de droit commun à Evine est menacée", a déclaré l'IHR basée à Oslo.
- Détenus étrangers en sécurité -
"Des prisonniers, y compris des détenus politiques, sont complètement sans défense" à Evine, a déclaré Hadi Ghaemi, directeur du Centre pour les droits de l'Homme en Iran (CHRI) basé à New York.
Parmi les détenus étrangers figurent l'universitaire franco-iranienne Fariba Adelkhah et l'Américain Siamak Namazi.
Mais le groupe de soutien de Fariba Adelkhah a affirmé avoir eu des nouvelles "rassurantes", et l'avocat américain de Siamak Namazi a déclaré que ce dernier avait "été transféré dans une zone sécurisée de la prison".
La famille du détenu autrichien Massoud Mossaheb a affirmé que ce dernier était en vie mais qu'il avait inhalé de la fumée. Et l'autre prisonnier autrichien Kamran Ghaderi est aussi en sécurité.
L'universitaire australienne Kylie Moore-Gilbert, qui a été détenue à Evine, a déclaré avoir appris des proches des prisonnières politiques qu'elles étaient "toutes en sécurité".
La sœur d'un citoyen américain détenu à Evine, l'homme d'affaires Emad Shargi, a tweeté elle que sa famille était "morte d'inquiétude".
"L'Iran est pleinement responsable de la sûreté de nos citoyens détenus à tort, qui doivent être libérés immédiatement", ont averti les Etats-Unis.
- "Bien plus" -
Selon des ONG, des manifestations ont eu lieu dans la nuit en solidarité avec les détenus d'Evine, après une journée de protestations contre la mort de Mahsa Amini sous le slogan "Le début de la fin !" du pouvoir.
La jeune femme est décédée trois jours après son arrestation pour avoir selon la police des moeurs enfreint le strict code vestimentaire en Iran qui prévoit surtout le port du voile.
Depuis, les Iraniennes, fer de lance des manifestations, ont crié des slogans antigouvernementaux, enlevé leur foulard et tenu tête aux forces de sécurité.
"Les mollahs doivent déguerpir !", ont scandé samedi des femmes sans voile au Collège technique et professionnel Shariati de Téhéran, selon une vidéo en ligne.
Des jeunes ont manifesté dans les universités de Téhéran, d'Ispahan (sud) et de Kermanshah (nord-ouest), selon des images partagées en ligne.
Les dirigeants iraniens accusent les Etats-Unis, leur ennemi juré, de déstabiliser leur pays en fomentant des "émeutes". Dimanche la diplomatie iranienne a encore rejeté les "ingérences" du président Joe Biden qualifié de "politicien fatigué".
Les manifestations en Iran sont les plus importantes depuis celles de 2019 contre la hausse du prix de l'essence dans ce pays riche en pétrole.
Mais selon Cornelius Adebahr, analyste pour Carnegie Europe, il faut "bien plus que des manifestations et des sanctions" de pays occidentaux pour renverser le régime iranien.
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