L'Otan a enclenché mardi le processus en vue d'intégrer la Suède et la Finlande à une ligne de défense allant de l'Arctique à la Méditerranée face à la Russie, mais la concrétisation de cet objectif dépend d'Ankara.
La signature des protocoles d'adhésion par les ambassadeurs des trente pays membres a ouvert mardi au siège de l'Alliance atlantique à Bruxelles le processus de ratification. "Je compte sur les alliés pour qu'il soit rapide", a lancé Jans Stoltenberg, le secrétaire général de l'Alliance, optant néanmoins pour la prudence.
"La dernière fois (pour la Macédoine du Nord), cela a pris douze mois", a-t-il rappelé au cours d'une conférence de presse avec les ministres des Affaires étrangères de Suède et de Finlande, Ann Linde et Pekka Haavisto.
Le Canada a été le premier pays à ratifier dès mardi les deux protocoles d'adhésion. "Nous exhortons tous les pays membres de l’Otan a terminer rapidement leur processus de ratification afin de limiter les possibilités d'ingérence de la part d'adversaires", a plaidé le Premier ministre Justin Trudeau.
L'Estonie doit suivre mercredi, a annoncé sa Première ministre Kaja Kallas. Les parlements du Danemark, de la Norvège et de l'Islande ont également donné leur accord à la ratification.
"Beaucoup d'alliés se sont préparés pour que la ratification soit la plus rapide possible, mais cela va prendre plusieurs mois", a estimé Jens Stoltenberg.
"L’estimation du gouvernement est que le processus de ratification peut prendre un an", a dit la Première ministre suédoise Magdalena Andersson.
Tout va dépendre de la Turquie. Son président Recep Tayyip Erdogan a donné son accord au sommet de Madrid à la mise en oeuvre de la procédure, mais il a rappelé aux deux candidats les engagements pris.
"S'ils remplissent leur devoir, nous soumettrons (le protocole d'adhésion) au Parlement" turc en vue de son adoption, mais "s'ils ne le font pas, il est hors de question pour nous de l'envoyer au Parlement...", a-t-il prévenu.
M. Erdogan a évoqué une "promesse faite par la Suède" concernant l'extradition de "73 terroristes". Ankara réclame depuis plusieurs années à Stockholm l'extradition de militants kurdes et de personnes proches du mouvement fondé par le prédicateur Fethullah Gülen, accusé par les autorités turques d'avoir fomenté la tentative de coup d’État de juillet 2016.
La ministre suédoise Ann Linde a démenti mardi toute promesse faite à la Turquie. "A Madrid, nous n'avons pas parlé de chiffres ni de liste de demandes d'extradition et nous n'avons pas reçu de liste de la Turquie", a-t-elle affirmé.
Mme Linde et son homologue finlandais ont par ailleurs tous deux insisté sur la volonté de leurs gouvernements de se conformer aux procédures judiciaires de leurs pays pour le traitement des demandes d'extradition.
Jens Stoltenberg a cherché à calmer le jeu devant les questions de plus en plus pressantes sur les engagements pris dans la capitale espagnole.
- "De l'Arctique au Sud" –
"La signature des protocoles d'adhésion est un jour historique pour la sécurité euro-atlantique, car l'invasion brutale de l'Ukraine par la Russie a remis en question la paix en Europe", a-t-il insisté. "Il est important que nous soyons solidaires en ces temps dangereux".
Les deux pays nordiques ont confirmé avoir renoncé à leur neutralité et décidé de rejoindre l'Otan à cause de la dégradation de la situation sécuritaire en Europe provoquée par la Russie.
"Notre sécurité collective exige une approche à 360 degrés, de l'Arctique au Sud", a plaidé le Finlandais Pekka Haavisto.
A Madrid, l'Otan a renforcé ses lignes de défense sur son flanc Est, des Pays baltes à la Bulgarie, ainsi que sa présence navale et aérienne en Méditerranée et dans la mer Noire.
Les adhésions de la Suède et de la Finlande vont apporter des "forces considérables" pour consolider ce dispositif dans la Baltique.
Le président russe "Vladimir Poutine a essayé de fermer la porte de l'Otan. Nous lui démontrons qu'elle reste ouverte avec les adhésions de la Suède et de la Finlande", a dit Jens Stoltenberg.
Trois autres pays partenaires ont souhaité rejoindre l'Alliance ces dernières années : la Bosnie-Herzégovine, la Géorgie et l'Ukraine. En mars, le président ukrainien Volodymyr Zelensky s'était toutefois déclaré prêt à renoncer à cette candidature.
La signature des protocoles d'adhésion accorde le statut de pays invité à la Suède et à la Finlande.
Mais elles ne bénéficieront pas de la protection de l'article 5 de la Charte de l'Otan en cas d'attaque, tant que les 30 Etats membres n'auront pas ratifié leur adhésion.
Plusieurs pays, dont la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis, se sont engagés à les assister en cas d'agression pendant l'intermède.
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