Gaza : les déplacés remontent en masse vers le nord, entre ruines et Méditerranée

Publié le 27 janv. 2025 à 11:42

  • Gaza : les déplacés remontent en masse vers le nord, entre ruines et Méditerranée

La masse noire, compacte, avance lentement et sans à-coup, la mer Méditerranée à sa gauche, les immeubles dévastés par la guerre à sa droite. Des centaines de milliers de déplacés palestiniens regagnent le 27 janvier 2025, le nord de la bande de Gaza.

Dans la nuit, Israël et le Hamas ont annoncé que leurs efforts diplomatiques étaient venus à bout de quelques blocages tenaces. Alors à 07H00 (05H00 GMT), sous la douce lumière du matin, les habitants se sont mis en route.

Un responsable de la sécurité à Gaza a indiqué à l'AFP que "plus de 200.000 déplacés étaient retournés à Gaza-ville dans les deux premières heures".

Hommes, femmes, enfants de tous âges marchent d'un même rythme, qui un sac en toile de jute sur le dos, qui poussant un chariot de fortune rassemblant ce qu'il put sauver depuis des mois et des mois d'errance.

Sur le côté, un homme est assis sur un tas de gravats et regarde la foule passer, un drapeau palestinien à la main. Certaines familles se serrent sur une charrette tirée par un âne, assises sur leurs affaires.

Les plus aisés sont en voiture, mais ils ont dû patienter quelques heures de plus pour avoir le droit de rouler vers le nord, sur l'avenue Salaheddine (Saladin), parallèle à la plage dans l'intérieur de l'étroit territoire.

Tous avaient dû quitter leur maison sous la violence des bombardements et des combats au sol entre combattants du Hamas et soldats israéliens.

- "Même avec de la boue et du sable" -

Arrivés au sud, ils ont vu la guerre se rapprocher, puis les rejoindre. Beaucoup ont perdu des membres de leurs familles, parfois par dizaines. Ce retour sonne comme un soulagement et un souffle d'espoir, quand bien même tout serait détruit.

"C'est le plus beau jour de ma vie", affirme sans détour Lamiss al-Iwady, 22 ans, en revenant chez elle. "C'est comme si mon âme et la vie m'étaient revenus", ajoute-t-elle, convaincue que la destruction de son quartier n'était que transitoire.

"Nous reconstruirons nos maisons, même si c'est avec de la boue et du sable".

Chadi Adas, revenu à Gaza-ville, raconte une ambiance de liesse communicative. "Des centaines de déplacés entonnaient des chants de fête et criaient +Dieu est le plus grand+", dit-il. "Ce jour ressemble à des vacances".

Dans le ciel, le bruit d'un drone israélien résonne, réminiscence de ce qui était, il y a encore quelques semaines, une crainte obsessionnelle de frappes. Cette fois, le bruit est largement recouvert par les chants et les cris de joie.

La scène aurait dû se produire samedi, selon l'accord de trêve entre Israël et le Hamas. Mais un désaccord portant sur la libération d'une otage israélienne civile, et sur la remise à Israël d'une liste stipulant le statut de tous les otages, vivants ou morts, a bloqué le processus.

Dans la nuit, la nouvelle a fini par être annoncée par le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu : l'otage Arbel Yehud retrouvera les siens jeudi, et Israël a reçu la liste.

Le blocage par Israël du corridor de Netzarim qui coupe la bande de Gaza en deux, de la frontière israélienne jusqu'à la mer, a donc été levé.

Le service de presse du gouvernement gazaoui estime que 135.000 tentes et caravanes sont nécessaires à Gaza-ville et dans le gouvernorat du nord du territoire, où plus de 90% du bâti est détruit.

Et même si nul ne l'évoque lundi, chacun sait que la trêve est fragile, en particulier au-delà des six semaines de la première phase, au cours de laquelle 33 otages doivent être échangés contre 1.900 Palestiniens détenus par Israël.